Affaire Lamine Ba : un policier jugé pour violences illégitimes

Ce n’est qu’au bout de quatre longues années de procédure que le policier Jérémie A. comparaissait devant le tribunal de Bobigny le jeudi 5 octobre pour des violences lors de l’interpellation d’un médiateur de la ville de Sevran, Lamine BA. La scène d’une extrême violence avait été filmée et diffusée sur les réseaux sociaux.

Ces faits remontent au 11 septembre 2019, au moment où un embouteillage s’était formé à proximité de la gare RER de Sevran-Beaudottes par des véhicules de police qui bloquaient une rue pour effectuer un contrôle. Parmi les véhicules bloqués se trouvait celui de Lamine Ba, 39 ans. Tout bascule lorsque l’ex médiateur de la ville, connu du quartier et des policiers sort de sa voiture pour demander aux fonctionnaires de libérer le passage afin de permettre aux autres automobilistes de circuler. C’est sur cet échange que les versions des faits s’opposent. De son côté, le policier Jérémie A. affirme qu’il aurait procédé à un contrôle et une interpellation pour outrage après s’être fait injurier. Il explique par ailleurs avoir tenté de mettre au sol l’ex médiateur suite à son refus de se soumettre à son contrôle. Ce que conteste vivement Lamine BA qui témoigne qu’il a en effet accepté le contrôle et défend que le policier lui aurait rudement parlé. « Je ne comprends pas, je n’ai pas commis de délit ni d’infraction et il me charge comme un taureau », s’est-il défendu.

Les images de cette scène démontrent encore plus la violence du policier. Un face à face brutal qui commence par des mots forts, puis des échanges de coups avant que des collègues n’interviennent et lui administre un coup de taser. Lamine recevra 5 jours d’incapacité totale de travail (ITT). Ce qui a permis à la juge de relever certaines incohérences dans le témoignage du fonctionnaire. Et de juger son comportement disproportionné.
Pour ces faits, le parquet de Bobigny avait requis un non-lieu mais la juge d’instruction a cependant renvoyé le policier en correctionnel pour violences illégitimes. Le procureur Loïc Pageot a finalement requis 3 mois de sursis pour le policier après un second examen de la vidéo. Le procureur qui avait d’abord classé le dossier suite au témoignage parfois contradictoire a cependant reconnu que le procès a permis un débat qu’il avait sous-estimé. Plus encore, il reconnait également que « la vidéo est un élément de preuve incontestable. (...) Ces violences n'étaient pas nécessaires », et admet que Lamine Ba « pare les coups et ne cherche pas en découdre. Il a une technique de combat. Il aurait pu lui infliger une sacrée dérouillée ». Ce qui semble prouver l’intention du médiateur de vouloir mettre un terme à la violence.

Comme le veut l’expression l’union fait la force, de nombreuses personnes se sont jointes à ce combat comme Assa Traore, Salah Zaouiya, Jérôme Rodrigues, Amal Bentounsi et Michel Zecler, tous étaient présents à l’audience. « Je comprends la douleur qu’il ressent, la retenue dont il a fallu faire preuve au moment des faits. Aujourd’hui, on a besoin de justice pour limiter ces incidents », s’était exprimé Michel Zecler. Après quatre années de bataille judiciaire, l’ex médiateur espère que justice soit faite car si « quand, nous, on faute, on est condamnés. Personne ne devrait être au-dessus des lois. Je ne sais pas comment ça va se passer aujourd’hui, j’ai déjà de la chance que l’affaire soit jugée ». Cette histoire lui aurait laissé une marque indélébile que le temps ne saurait effacer. Ayant particulièrement mal vécu cette situation, il lui est « impossible de reprendre une vie normale, on apprend à vivre avec, mais on ne s’en remet pas ».

Nous sommes donc dans l’attente du délibéré qui sera prononcé le 2 novembre prochain, en espérant un verdict juste et à la hauteur du préjudice. Gardons en mémoire cette promesse que tout Homme reçoit selon le bien ou le mal qu’il fait car c’est Dieu qui « rend à l'homme selon ses œuvres, et rétribue chacun selon ses voies. » [Job 34 v. 11]. Quoi que cette justice pourrait bien décider, nous savons du reste que le bien triomphe toujours du mal. Et espérons que plus de bavures tapis dans l’ombre et couvertes soient mises en lumière et les victimes justifiées.

La Rédaction

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